lunedì 11 aprile 2016

GÉRALD THUPINIER: AVANT QUE LE CERVEAU NE SOIT CONSCIENT DU GRAIN DE POUSSIÈRE DANS LE VENT - GALERIE DEPARDIEU, NICE




GÉRALD THUPINIER
AVANT QUE LE CERVEAU NE SOIT CONSCIENT DU GRAIN DE POUSSIÈRE DANS LE VENT
Galerie Depardieu
6, rue du docteur Jacques Guidoni - Nice
7/4/2016 - 30/4/2016

Le peintre Gérald Thupinier fait partie de ces peintres qui ont à voir avec les mots et en interrogent la puissance et les failles. Le langage est en effet central dans l'œuvre de Gérald Thupinier. Dans la série «Avant que le cerveau ne soit conscient du grain de poussière dans le vent», les mots font face, occupent la place centrale que les visages ont tendance à occuper dans la tradition picturale. Au cœur des toiles présentées à la galerie Depardieu, ce sont eux, les mots, qu'il faut désormais envisager – comme si justement il s'agissait de visages.
Ce n'est pas un hasard si Gérald Thupinier aime à dire que la peinture est au langage ce que le fumier est aux fleurs. Très souvent dans ses œuvres, le peintre introduit de manière frontale des citations en français ou en italien, souvent énigmatiques et brouillées, voire fragmentées, des lambeaux de mots qui survivent à leur propre sens.
On y aperçoit – plus qu'on y lit – le mot « pesanteur », mais aussi le mot « mot », qui se met lui-même en abyme, aux confins des nuances de gris. Souvent contorsionnés, ils flottent dans la matière toujours dense, et semblent essayer de toutes leurs menues forces de s'échapper du typhon, de réchapper d'un naufrage. Leur force est peut-être mise à mal, voire absolument vaine, mais leur existence est irréfutable. Sous leur signification contrariée par la matière qui s'écoule ou s'agite, par le geste du peintre qui renfrogne son œuvre, les mots apparaissent tout de même avec l'éclat voilé d'une épiphanie, telle que celle d'un visage qui enjoint le message le plus net et le plus sacré « tu ne tueras point ». Si la visagéité est la puissance propre au visage, ici Gérald Thupinier fait surgir une force nouvelle, propre aux mots des centres des tableaux: non pas la poésie, ni la rhétorique, encore moins la puissance lexicale mais le triomphe des mots brisés. Ici la peinture porte aux nues les mots qui, tels des corbeaux qu'on nourrit, finissent par crever les yeux du spectateur.
Par ailleurs, le rapport au temps n'est pas lésé dans les œuvres présentées à la galerie Depardieu. Par son travail sur la matière, le peintre semble empoigner ce qui, du temps, nous échappe fatalement. Les coulures, les empâtements, les empreintes, les couches superposées, la peinture essuyée attestent d'un travail sur la matière en tant qu'un des modes qu'a le temps de s'exprimer. C'est une matière tourmentée qu'on découvre ici, à la fois pleine de vie et en fuite.